La chaleur d’une puce d’eau : une nouvelle méthode de détermination du taux métabolique des invertébrés de petite taille

Résultats scientifiques

Le taux métabolique d’un organisme est un trait essentiel en écologie. Cependant,  mesurer le taux métabolique d'organismes modèles peut se heurter à des limitations techniques notamment pour les invertébrés de petite taille. Une équipe de chercheurs en écologie et chimie-physique de l’université Clermont Auvergne et de l’université de Lorraine ont développé une méthode mettant à profit la sensibilité de la microcalorimétrie  pour dépasser ce verrou technique. L’étude publiée dans Ecology Letters évalue ainsi le coût énergétique d’une contrainte alimentaire chez une puce d'eau, et ouvre la voie à l’unification de deux pans théoriques distincts que sont la Théorie Métabolique de l’Ecologie et l’Ecologie Stœchiométrique.

Dès la fin du 18e siècle, Lavoisier mesurait le « feu de la vie » en quantifiant la chaleur produite par  un cochon d’Inde au moyen d’une enceinte entourée de blocs de glace. Encore aujourd’hui, l’étude du métabolisme reste un élément clef à la base de nombreux concepts fondamentaux en Ecologie tout en suscitant encore beaucoup de débats. Ainsi, la théorie métabolique de l’écologie (TME) considère que le coût énergétique inhérent au maintien de la vie des espèces/organismes, en lien direct avec leurs masses, est le facteur prépondérant de la structuration des communautés d’organismes et, in fine, du fonctionnement des écosystèmes. Par opposition, des approches telles que la stœchiométrie écologique (SE), stipulent que ce sont les déséquilibres entre les apports de carbone et des autres éléments chimiques (par exemple l’azote ou le phosphore) qui vont être à l’origine de ces processus. Bien qu’un nombre croissant d’études tente de relier ces deux approches, les chercheurs se heurtent toujours à des écueils techniques et verrous d’ordre méthodologique, notamment pour mesurer précisément les taux métaboliques des organismes. En effet, les organismes modèles de la SE ne sont pas des cochons d’Inde mais des insectes ou des crustacés de seulement quelques microgrammes ! Une approche pluridisciplinaire menée au LMGE, de l’Université Clermont Auvergne, en partenariat avec le LIEC, de l’Université de Lorraine, alliant Chimie-Physique et Ecologie a permis de mettre au point une méthode par microcalorimétrie permettant de mesurer la chaleur émise par d’aussi petits organismes, aidant ainsi à caractériser leur budget énergétique. L’étude, publiée dans Ecology letters, démontre que chez Daphnia, microcrustacé modèle en écologie aquatique, une alimentation déséquilibrée en carbone augmenterait de 25 % ses dépenses énergétiques réduisant d’autant l’énergie pouvant être allouée à sa croissance. Le développement de cette méthode et son application à l’Ecologie pourrait s’avérer d’un intérêt majeur pour proposer une théorie unifiée en écologie.

Image retirée.
Graphique illustrant les flux de chaleur émis par des puces d’eau de tailles différentes montrant les différences selon l’âge des individus mais aussi la répétabilité pour des individus de même taille.
Image retirée.
Photographies du microcalorimètre en cours d’acquisition de données et d’une ampoule microcalorimétrique contenant une daphnie avant insertion dans l’appareil. Photo :T. Ruiz

 

Contact chercheur

Thomas RUIZ
Laboratoire Microorganismes : Génome et Environnement (LMGE - CNRS / Université Clermont Auvergne)
thomas.ruiz@uca.fr

Contact communication

Geneviève BRICHEUX
Genevieve.bricheux@uca.fr