La plasticité thermique des espèces invasives, une menace pour les écosystèmes

Résultats scientifiques

Les espèces invasives représentent une menace majeure pour la biodiversité mondiale, notamment dans les écosystèmes isolés tels que les Grands Lacs africains. Une étude parue dans NeoBiota met en lumière le rôle de la température dans la croissance, la survie et les stratégies immunitaires d’un escargot tropical invasif. Cette capacité d’ajustement, aussi appelée plasticité thermique, traduit des mécanismes compensatoires favorisant l’expansion de l’espèce, au détriment des espèces locales et de leurs habitats.

En résumé

  • Les variations de température influencent les traits biologiques et immunitaires d’un gastéropode tropical invasif.
  • Cette plasticité thermique renforce le potentiel invasif et la pression exercée sur les espèces indigènes face aux changements des écosystèmes.
  • Mieux comprendre les interactions entre invasions biologiques et changement climatique est essentiel pour améliorer les protocoles de conservation des écosystèmes en danger.

Originaire d'Asie, l'escargot d'eau douce Melanoides Tuberculata est déjà implanté dans de nombreux écosystèmes d’eau douce tropicaux et subtropicaux, dont le lac Malawi, un des Grands Lacs d'Afrique de l'Est. Pour mieux comprendre son expansion, une équipe menée par des chercheurs du laboratoire Évolution, Écologie et Paléontologie (EEP – CNRS / Univ. de Lille) a étudié l’impact de la température sur ses traits biologiques et immunitaires. Des populations clonales ont été observées à différentes températures :  20 °C, 26 °C et 32 °C. Les scientifiques ont cherché à mesurer la fécondité, la croissance, la taille des juvéniles et leur survie, ainsi que les réponses immunitaires des adultes. 

Les résultats montrent que bien que la croissance des jeunes escargots augmente avec la température, leur taux de mortalité s’accroît également. Chez les adultes, c'est la réponse immunitaire qui va varier en fonction de la température. A 20 °C, ils présentent une immunité préventive et énergivore, alors qu'à 32 °C, une réponse plus économique est privilégiée, déclenchée uniquement en cas d’infection. Cette plasticité leur permettrait de consacrer davantage d’énergie à la croissance et à la reproduction en milieu chaud.

Ces résultats mettent en lumière les stratégies compensatoires adoptées par M. Tuberculata face aux variations de température, renforçant son potentiel invasif. Sa capacité à moduler ses traits biologiques et immunitaires selon son environnement lui confère un avantage compétitif, particulièrement dans un contexte de réchauffement climatique. Cette étude souligne l’importance d’intégrer la plasticité des espèces envahissantes dans les évaluations de risque et dans l’élaboration de politiques de conservation adaptées.

Laboratoire CNRS impliqués

  • Evolution, Ecologie et Paléontologie (Evo-Eco-Paleo - CNRS/Univ Lille)
  • Éthologie animale et humaine (ÉthoS - CNRS / Université de Rennes / Université de Normandie) 

     

Référence de la publication

Van Bocxlaer, B., Offerle, J., Ortiz Sepulveda, C.M., Habert, R., Holl, A.-C., Denize-Proust, N., Dollion, A.Y., Pawindo, G., Chibwana, F.D., Cuvillier-Hot, V. Temperature-dependent versatility shapes invasiveness in the tropical freshwater gastropod Melanoides tuberculata. NeoBiota. Publié le 30 Mai 2025.

Contact

Bert Van Bocxlaer
Evolution, Ecologie et Paléontologie (EVO-ECO-PALEO - CNRS/Univ de Lille)
Virginie Cuvillier-Hot
viriginie.cuvillier@univ-lille.fr