Double mode de reproduction chez une guêpe parasitoïde

Résultats scientifiques écologie évolutive & Biodiversité

La reproduction sexuée est surprenante du point de vue des évolutionnistes : c’est le mode de reproduction privilégié au sein des organismes multicellulaires alors qu’il est paradoxalement plus « coûteux » que la reproduction asexuée. De fait, les évolutions vers l’asexualité sont fréquentes mais rarement couronnées de succès chez les animaux. Dans une étude publiée dans Peer Community Journal, des chercheurs décrivent un cas de reproduction asexuée à faible fréquence, potentiellement accidentelle, mais qui pourrait représenter une transition évolutive vers l’asexualité.

Chez les hyménoptères, qui regroupent les guêpes et les fourmis,  les femelles émergent d’un œuf fécondé, elles ont donc deux jeux de chromosomes (elles sont diploïdes). En revanche, les mâles se développent à partir d’un œuf non fécondé et sont ainsi munis d’un seul jeu de chromosomes (ils sont haploïdes).  Les mâles sont donc produits par reproduction asexuée ou parthénogenèse. Dans certains cas, des femelles diploïdes peuvent également être produites par parthénogenèse. Cependant ces deux modes de reproduction (sexuée ou asexuée) coexistent rarement.

Dans le cas de Cotesia typhae, en utilisant des approches de comportement et de biologie moléculaire, des chercheurs ont montré que des femelles étaient produites par parthénogénèse en faible fréquence au sein de populations se reproduisant essentiellement par voie sexuée. L’étude a montré que ce phénomène se produit dans une souche de laboratoire mais aussi dans une population naturelle. D’autre part, les chercheurs l’ont mis en évidence à la fois dans la descendance de femelles vierges - où quelques femelles apparaissent parmi une large majorité de mâles - mais aussi dans la descendance de femelles fécondées - où quelques femelles issues de parthénogenèse sont observées au sein d’une majorité de femelles issues de fécondation. Les chercheurs ont quantifié ce phénomène et montré que sa fréquence est variable mais n’excède pas 2 % de la descendance produite.

Ils ont également étudié génétiquement les mécanismes permettant de produire des femelles diploïdes à partir d’œufs non fécondés et ont montré que deux mécanismes distincts impliquant des anomalies dans la production des gamètes pouvaient être en jeu. Ils ont ensuite recherché si ces mécanismes étaient d’origine génétique ou bactérienne, plusieurs bactéries présentes dans des cellules de certains insectes  étant connues pour manipuler le sexe et le mode de reproduction chez leur hôte. Dans le cas présent, si l’influence de bactéries semble intervenir, un mécanisme purement bactérien peut être écarté.

Ces expériences mettent en lumière la grande diversité du déterminisme du sexe chez les hyménoptères. Elles illustrent également une voie possible d’évolution entre reproduction sexuée et asexuée.

 

Laboratoire CNRS impliqué

  • Évolution, Génomes, Comportement et Écologie (EGCE - CNRS / IRD / Université Paris-Saclay)

Référence

Claire Capdevielle Dulac, Romain Benoist, Sarah Paquet, Paul-André Calatayud, Julius Obonyo, Laure Kaiser, Florence Mougel. Spontaneous parthenogenesis in the parasitoid wasp Cotesia typhae: low frequency anomaly or evolving process? PCI Evolutionnary Biology. 2022

Contact

Claire Capdevielle Dulac
Évolution, génomes, comportement et écologie (EGCE - CNRS / IRD / Université Paris-Saclay)
Sylvie Salamitou
Correspondante communication - Évolution, génomes, comportement et écologie (EGCE - CNRS/IRD/Univ. Paris-Saclay)