Bénéfices pour la pêche et la biodiversité des aires marines protégées

Résultats scientifiques

Mieux comprendre et prédire les bénéfices des aires marines protégées pour la conservation de la biodiversité et pour la pêche est fondamental pour réconcilier protection et exploitation. Dans un article paru dans Conservation Letters, des chercheurs du CRIOBE, en collaboration avec l’école polytechnique de Milan et la station zoologique Station Zoologique Anton Dohrn, montrent que les bénéfices des aires marines protégées pour la conservation de la biodiversité et pour la pêche augmentent avec le niveau de protection. Les bénéfices pour la pêche à moyen- et long-terme sont cependant précédés d’un déclin sur le court-terme. Cette étude démontre l’importance d’augmenter les niveaux de protection des aires marines protégées existantes pour leur permettre de bénéficier à la biodiversité et aux populations qui en dépendent.

En résumé

  • Les bénéfices pour la conservation de la biodiversité et la pêche des réseaux d'aires marines protégées augmentent avec l'augmentation des niveaux de protection. Cela plaide pour une augmentation des niveaux de protection pour atteindre les objectifs nationaux et internationaux de conservation et de gestion des pêches.
  • Les bénéfices pour la pêche dans les zones situées entre les aires marines protégées d'un réseau sont plus élevés lorsqu'elles sont connectées par de la dispersion larvaire.
  • Les augmentations des captures sont précédées d'une diminution à court terme.

L’augmentation des activités humaines sur l’océan a causé des impacts sans précédent sur les écosystèmes marins, la surpêche constituant la principale menace pesant sur la biodiversité marine. Les aires marines protégées (AMP) sont des outils largement utilisés pour la conservation de la biodiversité. L’efficacité écologique des zones intégralement protégées, c’est-à-dire n’autorisant aucune activité extractive (par exemple, la pêche), a été largement prouvée. Cependant, la mise en place de vastes réseaux d’AMP demeure complexe en raison des coûts liés aux déplacements des pêcheries. Ainsi, l’utilisation de zones partiellement protégées est souvent proposée comme alternative. Toutefois, davantage d’études sont nécessaires pour comprendre l’impact du niveau de protection et de la durée de protection sur les effets écologiques et halieutiques de ces réseaux. C’est dans ce contexte que cette étude, publiée dans Conservation Letters, s’est intéressée à l’impact de différentes mesures de gestion - notamment des réseaux d’AMP intégralement et partiellement protégées – sur la biomasse et les captures d’une espèce exploitée.

Pour ce faire, l’équipe internationale de chercheurs a utilisé un modèle de métapopulation d’un poisson côtier à usage commercial, le sar commun (Diplodus sargus (Linné 1758)) pour comparer les performances temporelles de la gestion par limites de captures (donc non spatialisée), de grandes AMP, et de réseaux d'AMP dans un contexte de surpêche. L’équipe a évalué combien les la biomasse et les captures sont influencées par la connectivité larvaire et le niveau de protection. Elle a également distingué les impacts relatifs des zones non protégées situées entre les AMP et des zones non protégées plus éloignées (moins affectées par les déplacements d’effort de pêche et l'exportation potentielle de biomasse) sur les captures totales de sars.

Les résultats ont révélé que les bénéfices en matière de conservation et de pêche augmentent avec les niveaux de protection. Les captures dans les zones situées entre les AMP sont en outre plus nombreuses lorsque ces zones sont connectées par la dispersion larvaire. Par ailleurs, les augmentations des nombres de captures suite à la mise en place d’un réseau d’AMP sont précédées d'une diminution à court terme. Enfin, dans un contexte de surpêche, la gestion spatialisée s’est révélée plus efficace que la gestion non-spatialisée. Dans l’ensemble, les résultats plaident en faveur d'une augmentation des niveaux de protection afin d'atteindre les objectifs internationaux de conservation de la biodiversité et de gestion des pêches.

visuel AMP
Figure 1 : Aire marine protégée à Moorea, en Polynésie française. © Joachim Claudet

 

Référence

Sève, C., Belharet, M., Melià, P., Franco, A., Calò, A., & Claudet, J. Fisheries Outcomes of marine protected area networks: levels of protection, connectivity, and time matter. Conservation Letters, publié le 31/10/23.

Laboratoire CNRS impliqué

Centre de recherche insulaire et observatoire de l'environnement (CRIOBE - CNRS/EPHE-PSL/Univ. Perpignan via Domitia)

Objectif de développement durable

ODD

Objectif 14 : Conserver et exploiter de manière durable les océans, les mers et les ressources marines aux fins du développement durable

Contact

Joachim Claudet
Centre de recherche insulaire et observatoire de l'environnement (CRIOBE - CNRS/EPHE-PSL/Univ. Perpignan via Domitia)
Charlotte Sève