Comment la marche des babouins éclaire l’évolution de la bipédie humaine
Comment la bipédie humaine a-t-elle évolué vers plus d’efficacité énergétique ? En analysant la marche bipède occasionnelle des babouins, des chercheurs ont modélisé les transferts d’énergie entre segments corporels. Leurs résultats, publiés dans la revue American Journal of Biological Anthropology, révèlent des similarités et des différences clés avec l’humain, et suggèrent que de simples ajustements posturaux pourraient avoir joué un rôle crucial dans l’émergence d’une bipédie plus efficace chez nos ancêtres.
En résumé
- La marche bipède des babouins est moins efficace que celle des humains, notamment à cause d’une mauvaise coordination entre le tronc et les bras, entrainant une perte d’énergie.
- Pourtant, ils partagent certains aspects de notre mécanique de marche, notamment dans le mouvement des cuisses et des jambes
- Des ajustements posturaux pourraient améliorer leur démarche, éclairant l’évolution de notre bipédie humaine.
Marcher sur deux jambes de manière bien redressée nous semble aujourd’hui parfaitement naturel. Pourtant, cette façon de se déplacer, propre aux humains, résulte d’un long processus évolutionnaire dont les mécanismes restent encore largement incompris et font l’objet de nombreuses études en anthropologie biologique.
Une équipe de chercheurs des laboratoires Histoire Naturelle des Humanités Préhistoriques (HNHP), Anthropologie bio-culturelle, Droit, Ethique et Santé (ADES) et de la Station de Primatologie (SdP), a récemment exploré cette question en s’intéressant à la marche bipède des babouins. Bien que principalement quadrupèdes, ces primates se déplacent parfois sur deux jambes. Leur posture, avec les hanches et les genoux fléchis, diffère toutefois de la nôtre et demande davantage d’énergie. Cette démarche pourrait néanmoins représenter une étape intermédiaire dans l’évolution de notre bipédie. En effet, tous les primates non-humains qui marchent en bipédie ont les membres fléchis, suggérant que la bipédie humaine proviendrait d’une forme ancestrale similaire.
Pour en savoir plus, les scientifiques ont analysé les déplacements de 17 babouins, jeunes et adultes, en mesurant leurs mouvements corporels et les transferts d’énergie sur 40 pas. En comparant ces données à celles des humains, ils ont cherché à comprendre les mécanismes d’une marche plus économe.

Leurs résultats montrent d’abord que l’efficacité énergétique varie avec l’âge : les jeunes babouins marchent différemment des adultes. De plus, les babouins récupèrent beaucoup moins d’énergie d’un pas à l’autre que les humains. Toutefois, certaines parties du corps, comme les cuisses et les jambes, présentent des mouvements similaires. À l’inverse, les mouvements du tronc et des bras sont nettement moins bien coordonnés, entrainant d’importantes pertes d’énergie.
Il suffirait donc de modestes ajustements, notamment au niveau du tronc, pour améliorer significativement l’efficacité de la marche bipède chez ces primates. Ce résultat appuie l’idée que nos ancêtres ont pu progressivement adopter une marche plus efficace en modifiant légèrement leur posture et leur coordination corporelle, sans transformation radicale immédiate.

Cette étude propose une nouvelle manière de penser l’évolution de la bipédie : non pas comme une révolution soudaine, mais comme un affinement progressif, fait de petits gains énergétiques cumulés. Une hypothèse qui replace les gestes les plus simples, comme celui de marcher, au cœur de notre histoire évolutionnaire.
Crédit photo bandeau haut de page :
© Cédric SUEUR/Marie PELE/IPHC/CNRS Images
Laboratoires CNRS impliqués
- Histoire Naturelle des Humanités Préhistoriques (HNHP – CNRS / MNHN / UPVD)
- Anthropologie bio-culturelle, Droit, Ethique et Santé (ADES – CNRS / AMU / EFS)
- Station de Primatologie (SdP – CNRS)
Référence de la publication
Druelle, F., Özçelebi, J., Marchal, F., & Berillon, G. (2025). Analyzing Instantaneous Energy in Bipedal Walking of Baboons : A Model for Exploring the Evolutionary Transition Toward Efficient Bipedalism in Hominins. American Journal Of Physical Anthropology. Publié le 24 avril 2025.